Le Palais des Congrès de Montréal a récemment vibré au rythme de l’innovation avec l’événement ALL IN 2024, réunissant un parterre d’experts internationaux, mais aussi des figures locales incontournables du domaine de l’intelligence artificielle (IA). Parmi eux, le ministre François-Philippe Champagne, HongSwei Liu, PDG de Mappedin, et Sasha Luccioni, responsable de l’IA pour le climat chez Hugging Face. Une brochette d’intervenants à la fois diversifiée et représentative des ambitions canadiennes en matière de technologie. Leur message? Le Canada est prêt à devenir un leader mondial de l’IA, mais il faudra plus que de bonnes idées pour y arriver.
Montréal, cœur battant de l’IA
Lorsque François-Philippe Champagne monte sur scène, il ne cache pas sa fierté : «Montréal, c’est LA place pour l’IA. On est en train de devenir un carrefour mondial.» Le ministre n’exagère pas. Avec plus de 4 000 participants cette année, l’événement ALL IN ne cesse de prendre de l’ampleur, attirant des délégations de pays aussi variés que le Japon et l’Inde. La réputation de la métropole québécoise dans le domaine n’est plus à faire, surtout avec des figures comme Yoshua Bengio ou des startups qui fleurissent dans chaque coin de rue. C’est ici que l’avenir de l’IA se dessine, et ce n’est pas qu’un simple slogan.
Une politique d’avant-garde, mais des défis à surmonter
Là où le ministre frappe fort, c’est lorsqu’il rappelle que le Canada a été l’un des premiers pays au monde à se doter d’une politique nationale sur l’IA. «On a vu juste, et on est en avance sur beaucoup de pays», souligne-t-il. Pourtant, le ministre admet que tout n’est pas gagné : il faut maintenant transformer cette avance en réalité tangible.
L’IA, ce n’est pas juste une affaire de robots ou de machines qui remplacent les humains. C’est une opportunité pour tout le monde. On doit passer de la peur à la confiance.
François-Philippe Champagne, Ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie du Canada
Et c’est là que ça devient intéressant : la confiance. Parce qu’en matière d’IA, la confiance est plus qu’une simple question de technologie. Elle repose sur des bases éthiques solides, un domaine où le Canada excelle, selon Sasha Luccioni. «Ici, on parle d’une IA responsable. Pas question de tout faire à toute vitesse sans réfléchir aux conséquences. C’est notre marque de fabrique», dit-elle avec conviction.
Des talents qu’on célèbre trop peu
Pour HongSwei Liu, le vrai défi se trouve ailleurs. Si le Canada dispose d’un écosystème de talents impressionnant – il cite la grande qualité des universités et le nombre croissant de startups en IA – il reste frustré par la manière dont ces innovateurs sont perçus. «On célèbre nos hockeyeurs comme des héros nationaux, mais personne ne connaît nos chercheurs en IA. Pourquoi est-ce que Yoshua Bengio n’a pas autant de fans que Sidney Crosby?», lance-t-il, mi-sérieux, mi-amusé.
C’est un point qui fait réfléchir. Pourquoi, effectivement, le grand public n’est-il pas aussi enthousiaste à l’idée de voir un jeune Canadien exceller en IA qu’il ne l’est pour un athlète? Cette question ne concerne pas seulement la culture populaire, elle touche aussi à la manière dont on inspire la jeunesse à se tourner vers la technologie, un secteur pourtant crucial pour notre avenir.
L’innovation avec une conscience
Sasha Luccioni, elle, met l’accent sur un autre point. Oui, le Canada a tout pour devenir un leader mondial de l’IA, mais à condition de ne pas perdre de vue les enjeux sociaux et environnementaux. «On parle beaucoup d’IA, mais il faut aussi parler de soutenabilité. À quoi bon innover si c’est pour aggraver les crises climatiques?» En tant que responsable de l’IA pour le climat chez Hugging Face, elle milite pour une innovation technologique plus responsable.
Elle partage une réflexion qui fait écho à l’identité canadienne : «On ne travaille pas 18 heures par jour comme aux États-Unis, et on ne prend pas de longues pauses comme en France, mais on a trouvé un équilibre. Et c’est ce qu’on doit promouvoir à l’international.» Cette approche humaniste et réfléchie de l’IA est peut-être le meilleur atout du Canada sur la scène mondiale.
Vers un avenir lumineux, mais encore flou
Alors, où en est-on exactement? Le Canada est-il réellement prêt à dominer l’échiquier mondial de l’IA? François-Philippe Champagne reste optimiste, mais réaliste : «On a les cerveaux, on a les idées, et on a une longueur d’avance. Mais il nous manque encore quelques pièces du casse-tête, comme la capacité de calcul (GPU) pour vraiment passer à la vitesse supérieure.»
Mais ce qui ressort de cette conférence, c’est qu’au-delà des infrastructures, il faudra une vraie transformation culturelle. Nous devons, en tant que Canadiens, cesser de sous-estimer nos capacités, nos talents et notre potentiel. Il est temps de rêver grand et de faire de l’IA un vecteur de changement, tout en restant fidèles à nos valeurs.
Le Canada à la conquête de l’avenir
Si l’IA va transformer nos vies, elle doit le faire de manière inclusive et responsable. Le Canada, avec son approche équilibrée, sa diversité culturelle et sa volonté d’innover pour le bien commun, est en position de leader. Mais pour y parvenir, il faudra plus que des conférences et des discussions. Il faudra une réelle prise de conscience collective, une mobilisation nationale pour que l’IA devienne une fierté partagée, aussi grande que celle que nous éprouvons pour nos hockeyeurs.
Alors, qu’attendons-nous pour célébrer nos innovateurs? Le futur est à portée de main, il ne tient qu’à nous de le saisir.