Voitures électriques : déjà vieilles avant d’être usées

Steeve Fortin
Par
Steeve Fortin - Éditeur
8 minutes de lecture

En août 2023, j’avais publié dans les journaux des Coopératives de l’information une chronique où je faisais une prédiction : la désuétude technologique des voitures électriques allait s’imposer plus vite qu’on ne le croyait. Deux ans plus tard, cette réflexion prend une tournure bien concrète.

En août 2023, j’avais publié dans les journaux des Coopératives de l’information une chronique où je faisais une prédiction : la technologie finirait par rendre les voitures électriques rapidement désuètes. Deux ans plus tard, cette réflexion prend une tournure bien concrète. L’été dernier, mon vieux VUS s’approchait des dix ans, et les réparations commençaient à coûter plus cher qu’une voiture neuve. Je l’ai gardé aussi longtemps parce qu’il me servait à tirer ma roulotte, mais j’ai fini par me résoudre à vendre cette dernière et à faire le saut vers l’électrique.

Le marché de l’usagé, victime de la désuétude technologique des voitures électriques

Au départ, mon plan était simple : trouver une voiture électrique usagée. C’est là que je suis tombé dans un véritable trou de lapin, et que mon texte d’il y a deux ans s’est mis à résonner avec une justesse troublante. Dans le marché de l’usagé, les prix sont étonnamment accessibles. Certains modèles vendus près de 80 000 $ il y a trois ou quatre ans se retrouvent aujourd’hui sous la barre des 30 000 $. En tant qu’amateur de technologie et de mécanique, j’étais curieux et motivé à trouver la perle rare. Mais très vite, j’ai eu l’impression qu’à part Tesla, presque toutes les voitures électriques avaient vieilli prématurément sur le plan technologique.

Tesla, l’exception face à la désuétude technologique

Tesla fait figure d’exception, non seulement parce que ses véhicules ont été parmi les premiers sur le marché, mais surtout parce que leurs mises à jour logicielles continues font évoluer la voiture au fil du temps. Résultat : les modèles changent peu d’année en année et semblent mieux vieillir que ceux de la concurrence. Ailleurs, chaque voiture avait ce petit quelque chose qui clochait, une interface dépassée, une connectivité limitée, une autonomie déjà inférieure à la moyenne. Bref, plusieurs modèles de trois ou quatre ans paraissent déjà en retard.

Tesla Model 3 blanche, vue de profil, design presque inchangé depuis 2018, symbole de durabilité logicielle. (Crédit : Tesla)
La Tesla Model 3 n’a que peu changé depuis 2018, preuve qu’une évolution logicielle peut suffire à garder un véhicule moderne. (Crédit : Tesla)

Du coup de pied sur le pneu à l’obsolescence logicielle

Autrefois, on choisissait une voiture selon son kilométrage et la condition de sa carrosserie. Deux ou trois petits coups de pied sur le pneu et hop ! Aujourd’hui, j’ai la conviction que mes doutes pendant mon magasinage d’un véhicule électrique usagé sont partagés par bien d’autres. Même si les batteries se montrent étonnamment durables et s’usent souvent moins vite qu’on le craignait, les rares histoires d’horreur de consommateurs ayant dû remplacer leur batterie pour plusieurs dizaines de milliers de dollars suffisent à semer la crainte.

L’achat du neuf : contourner la désuétude technologique ?

Malgré les économies parfois impressionnantes qu’offrent les véhicules électriques usagés, j’ai finalement décidé de me tourner vers le neuf. Il faut dire que le prix des voitures, toutes motorisations confondues, a fait un bond de géant ces dernières années. Maudit que c’est rendu cher un char ! Devant des étiquettes qui frôlent désormais le prix d’une maison secondaire, le choix devient aussi émotif que rationnel.

Le dilemme du siècle : location ou achat

Rendu là, quelle voiture choisir ? Après avoir épluché le Guide de l’auto, l’Annuel de l’automobile et regardé une quantité industrielle de vidéos sur YouTube, j’ai décidé de passer à l’étape suivante : aller voir les concessionnaires en personne. Rien ne remplace le contact direct, la sensation derrière le volant et, disons-le, la réalité du financement.

C’est là que le vrai dilemme s’est imposé : location ou achat ? J’ai toujours acheté mes voitures, parce que je les garde longtemps. Mais cette fois, un doute persistant m’a habité. Comme un syndrome du iPhone. Cette impression que ma voiture pourrait devenir technologiquement dépassée bien avant d’être usée mécaniquement. Que dans quatre ans à peine, un modèle plus intelligent, plus connecté ou plus autonome vienne reléguer le mien au rang de vieillerie numérique.

La Ioniq 6, un pari mesuré

J’ai donc choisi d’être conservateur et de louer ma voiture pour quatre ans. La mensualité était raisonnable, et si jamais la voiture électrique ne me convient pas, je n’aurai à la supporter que quelques années. Mon choix s’est arrêté sur la Hyundai Ioniq 6, une voiture au design controversé, certes, mais d’une efficacité énergétique remarquable. Je souligne d’ailleurs le service impeccable de Hyundai du Saguenay — et précisons-le, sans aucune commandite ni avantage particulier. Je compte d’ailleurs produire une vidéo dans les prochains mois pour partager mes impressions après mes premiers kilomètres électriques.

Une transition énergétique à double tranchant

Je sais que l’électrification des transports représente un pas important dans la réduction des gaz à effet de serre. Je sais aussi que la fabrication d’un véhicule électrique requiert une quantité considérable de ressources, et que l’usure accélérée des pneus, due au poids des véhicules, constitue une forme de pollution bien réelle. Au-delà de ces constats, j’apprécie mon expérience électrique jusqu’à présent. Mais je n’ai pas encore affronté un hiver québécois complet, et c’est là que mon opinion se précisera vraiment.

La tentation technologique et le risque de surconsommation

Reste qu’une question me hante : est-ce que le geste de vouloir réduire les émissions ne sert pas parfois de prétexte à une nouvelle forme de surconsommation automobile ? Toute cette technologie embarquée, ces systèmes toujours plus sophistiqués, ces gadgets connectés, ne viennent-ils pas diluer les efforts environnementaux qu’ils prétendent soutenir ? Les consommateurs veulent la dernière version, la recharge plus rapide, la batterie plus performante, et cette quête de nouveauté rend les modèles plus âgés moins désirables, malgré un kilométrage souvent dérisoire.

Sauver la planète ou nourrir la désuétude automobile ?

Est-ce que les fabricants automobiles veulent réellement sauver la planète, ou simplement réduire le cycle de consommation des véhicules ? Si l’usagé devient moins attrayant, que fera-t-on de ce parc automobile dans dix ans, lorsque des voitures encore fonctionnelles seront jugées obsolètes ? Sauver l’environnement, c’est aussi apprendre à ralentir.

Écoutez ma chronique techno du 3 novembre 2025 sur les ondes de KYK 95,7 https://www.957kyk.com/audio/734849/pourquoi-le-vote-electronique-n-est-pas-en-place-pour-eviter-le-brouhaha

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