En cette journée d’élections fédérales, les Canadiens voteront comme ils l’ont toujours fait : avec un bulletin de papier, un crayon de plomb et une boîte scellée. Ce n’est pas un caprice ni un retard technologique. C’est un choix réfléchi pour préserver l’intégrité électorale et maintenir la confiance du public.
Le vote papier est concret, visible, vérifiable. Un recomptage manuel est possible si nécessaire, sans dépendre d’ordinateurs ou de serveurs vulnérables aux cyberattaques. Dans un monde où les menaces informatiques augmentent, cette méthode traditionnelle agit comme un rempart solide contre la fraude électorale.
Les risques du vote électronique
À première vue, permettre de voter à partir d’un téléphone intelligent semble une idée séduisante. Cela faciliterait la participation des électeurs vivant à l’étranger, en région éloignée ou à mobilité réduite. Mais derrière cette accessibilité se cache une montagne de risques : piratage, fraude, perte du secret du vote et défaillances techniques majeures.
Le vote électronique multiplie les points d’entrée pour des cyberattaques. Il devient difficile d’assurer que le choix exprimé par l’électeur est bien celui qui est comptabilisé. Le simple fait que le vote puisse se dérouler hors d’un environnement contrôlé soulève des risques de coercition et d’achat de votes.
Pour le Canada, tant que la technologie ne peut garantir une sécurité aussi solide que le bulletin papier, il est hors de question de faire le saut.
Ailleurs dans le monde
Certains pays, malgré les risques, ont décidé de faire confiance au vote électronique.
En Estonie, les citoyens peuvent voter par Internet depuis 2007 en utilisant leur carte d’identité numérique. Aujourd’hui, près de la moitié des électeurs estoniens utilisent ce mode de scrutin.
Le Brésil a généralisé l’utilisation d’urnes électroniques pour ses élections nationales, un système opérationnel depuis plus de vingt ans.
En Inde, des centaines de millions d’électeurs utilisent des machines électroniques portatives pour voter, sans trace papier. La Belgique, de son côté, utilise des machines de vote dans plusieurs régions, notamment à Bruxelles.
La Suisse a aussi expérimenté le vote par Internet, principalement pour ses citoyens vivant à l’étranger. Toutefois, après la découverte de vulnérabilités critiques, certains projets ont été suspendus.
L’expérience américaine : entre risques avérés et controverses politiques
Depuis l’élection de 2020, les machines de vote américaines sont au cœur de nombreuses théories du complot. Pourtant, de multiples audits officiels ont confirmé qu’il n’y avait pas eu de fraude généralisée.
Les experts en cybersécurité, eux, tirent la sonnette d’alarme depuis longtemps. Lors du DEF CON Voting Village, des hackers ont démontré qu’il était possible de pirater plusieurs modèles de machines utilisés aux États-Unis. Les risques d’intrusion, de manipulation de résultats et de sabotage sont bien réels, même s’ils n’ont pas été massivement exploités en pratique.
Fait récent et plutôt inusité : lors d’un discours, Donald Trump a publiquement remercié Elon Musk pour « sa connaissance des ordinateurs de vote » en Pennsylvanie, laissant planer des spéculations sur une possible manipulation. Bien qu’aucune preuve n’ait été avancée, ces déclarations ont alimenté la méfiance et renforcé le climat de suspicion autour du vote électronique.
Gardons ça simple… pour une fois !
À travers ces exemples, une chose devient claire : même avec des ressources technologiques avancées, les risques associés au vote électronique sont bien présents. Certains pays persistent, d’autres, comme les Pays-Bas et l’Irlande, sont revenus au scrutin papier après des échecs cuisants.
Le Canada, fidèle à sa tradition de prudence, refuse de sacrifier la confiance du public sur l’autel de la rapidité ou de la modernité. Pour Ottawa, il ne s’agit pas seulement de voter plus vite ou plus facilement. Il s’agit de voter en toute sécurité, avec des garanties solides et sans équivoque.
Et franchement, avec tous les fiascos informatiques que nous avons connus au pays ces dernières années, voulons-nous vraiment nous lancer dans un projet d’une telle envergure pour nos élections? Quand un simple crayon de plomb et un bout de papier continuent de faire amplement l’affaire, la réponse semble couler de source.